CHAPITRE XVIII

La nuit était tombée depuis longtemps quand la première alarme retentit. Les soldats envoyés au sol par l’amiral Kre’fey avaient installé des détecteurs pour repérer les infrarouges émis par les Yuuzhan Vong.

Deux ailes Tie de l’Escadron des Durs partirent faire une reconnaissance de la zone où les détecteurs avaient signalé un mouvement.

Gavin les avait regardées voler vers le sud. Assis dans son cockpit, il les observa sur son moniteur principal, écoutant aussi leurs échanges radio. La voix d’un des pilotes révéla son trouble quand il vit une colonne de Yuuzhan Vong arriver.

A cinq ou six kilomètres, une colonne de feu rougeâtre monta vers les chasseurs, qui l’évitèrent sans peine.

– Contacts multiples. Des troupes de fantassins, rapporta le pilote. Deux grands véhicules et douze plus petits. Les gros ont des défenses gravitationnelles et des canons à plasma. Les petits, seulement des canons à plasma. Nous repérons des contacts aériens.

Gavin enfonça un bouton sur son unité com.

– Rogue Leader à tous les Rogues. L’ennemi est là, et nous allons le pulvériser !

Il lança la séquence de mise en route et attendit que les voyants passent au vert.

– Catch, branche-toi sur la fréquence tactique de la base, et fais clignoter le voyant s’il y a urgence.

Gavin dévia la puissance vers ses répulseurs, puis ouvrit les gaz. Ensuite, il bloqua les stabilisateurs en position de combat et fit pivoter le chasseur de cent-quatre-vingts degrés.

– Vol Un, avec moi !

Une série de doubles-clics sur la fréquence de l’escadron confirma que chacun était à son poste. Catch montra plusieurs ennemis sur l’écran.

On dirait qu’ils ont envoyé deux escadrons de skips. J’espère que la chance sera de notre côté !

Gavin jumela ses lasers et verrouilla son réticule de visée sur un skip. Il appuya sur la détente secondaire, arrosant le skip de rayons d’énergie rouge.

– Dur, virez à bâbord !

L’Affreux obéit. Le skip resta collé à la queue de l’aile Tie. Gavin pivota vers tribord, gardant le Vong dans sa mire. Pendant que Nevil canardait le skip, Gavin appuya sur la détente principale et envoya une salve de laser à pleine puissance. Le trou noir qui captait les tirs du Quarren dévia les coups de Gavin, les attirant vers le basal dovin qui produisait le trou noir.

Les rayons frappèrent la chair rocheuse du corail skipper. Un fluide s’évapora, puis la poupe du vaisseau pointa vers le bas. Nevil tira sur l’autre flanc du navire, qui resta un instant comme suspendu en l’air. Un coup tua sans doute un basal dovin, car le vaisseau tomba et s’écrasa.

Il verrouilla son réticule de visée sur un skip, le doigt sur la détente.

Luke s’éveilla en captant l’anxiété et la nervosité des pilotes. Le bruit des chasseurs qui décollaient finit de le réveiller. Il passa une tunique, suspendit la ceinture de son sabre laser à son épaule, sortit de sa tente et regarda les chasseurs partir vers le sud.

Un moment, il regretta de ne pas être avec eux.

Avec R2-D2 derrière moi, dans un combat aérien.

Il frissonna… Un Maître Jedi ne devait pas s’appesantir sur ce genre de souvenirs. Aimer le combat était un mal nécessaire, tolérable si le Jedi contrôlait cette impulsion et en faisait le meilleur usage. Dans le meilleur des cas, voir la frontière entre les actions offensives et défensives était difficile.

Mais quand Luke vit les réfugiés sortir de leurs tentes en se frottant les yeux, il sut où elle se situait.

– Où veux-tu que j’aille ? demanda Mara en le rejoignant.

Elle avait l’air épuisé.

– Tu veux la vérité ?

– J’ai confiance en ton jugement, Luke.

– Parfait. Je voudrais que tu aides Leia à calmer les civils. Nous n’avons pas besoin de problèmes de ce côté-là. Je sais que tu aimerais mieux…

Mara posa un doigt sur les lèvres de Luke.

– J’ai dit que je te faisais confiance. Tu m’envoies où tu as besoin de moi ! Si je suis nécessaire ailleurs, tu me le feras savoir.

Luke serra sa femme dans ses bras.

– Je t’aime, Mara. Pour ça et pour tout le reste.

– Je sais. Chacun de nous accomplira son devoir, et nous vaincrons les Yuuzhan Vong. Compte là-dessus !

– Et avec toi. Quand tu auras besoin de moi, je serai là.

Mara partit vers le centre du camp. Luke se dirigea vers le périmètre sud. Il trouva vite le colonel Bril’nilim. Ce Twi’lek chargé des soldats de la Nouvelle République sondait l’horizon avec des macrobinoculaires. Luke sentit qu’il était frustré et ne le dérangea pas.

Le Twi’lek se retourna et lui tendit les jumelles.

– Peut-être en verrez-vous davantage que moi.

– Les Yuuzhan Vong arrivent, mais tout le monde le sait. Leurs premiers rangs seront sans doute composés d’esclaves, pour épargner leurs propres guerriers. Où voulez-vous que je me poste ?

Bril’nilim désigna le sud-est.

– Vous, par ici, et vos neveux au sud-ouest. Informez-moi si vous percevez quelque chose de bizarre, et je vous enverrai des éclaireurs.

– A vos ordres, colonel.

Luke se retourna, sentant ses neveux derrière lui.

– Vous avez entendu ?

– Oui, dit Jacen. Anakin et moi partons vers le sud-ouest, et toi à l’opposé. Nous ferons un rapport sur tout ce qui nous semble bizarre.

– Parfait. Ne prenez pas d’initiatives téméraires, compris ?

Le tentacule crânien du colonel Bril’nilim ondula comme un serpent.

– Compris ! répéta-t-il. Pas d’héroïsme. Mes troupes tireront sur tout ce qu’elles ne pourront pas identifier, et un Jedi se faufilant dans la nuit en fera partie. Pigé ?

– Oui, monsieur, dirent les deux jeunes Jedi.

– Parfait. Allez-y ! Je suis content d’avoir trois Jedi à mes côtés. J’espère qu’aucun de nous n’aura à se battre, mais…

– Rogue Onze avec vous, Dur Sept.

– Merci, Brindilles.

La Jedi fit pivoter son aile X sur le stabilisateur bâbord et se plaça à tribord de l’X-cepteur. Les ailes d’intercepteur Tie du X-cepteur crachèrent des salves de laser, abattant des dizaines de soldats yuuzhan vong. D’après ce que vit Jaina, aucun ne tenta de prendre la fuite.

Ils semblent plus petits et courtauds que je m’y attendais d’après la description de Jacen.

Un corail skipper fondit sur l’X-cepteur. Jaina l’arrosa d’un feu nourri. Un trou noir apparut devant le vaisseau, absorbant l’essentiel des rayons. Jaina garda son vaisseau en ligne et lâcha un coup de quadrilaser qui obligea le pilote yuuzhan vong à filer. Quand il vira à bâbord, Jaina tourna dans la même direction et se positionna sur la queue de l’X-cepteur de Dur Sept.

Je n’aime pas beaucoup servir de bouclier, mais je dois lui donner la possibilité de placer un coup au but.

Quand l’X-cepteur largua une torpille à protons, Jaina gagna un peu d’altitude. Sous elle, la torpille fila vers la cible la plus proche, puis explosa.

Le filtre lumineux de la verrière de l’aile X s’enclencha aussitôt, lui permettant de voir ce qui se passait. La torpille avait explosé à une centaine de mètres de l’ennemi. Un trou noir avait absorbé l’essentiel de l’énergie, mais le reste fit des ravages sur les troupes au sol. L’énergie désintégra les soldats, éliminant des compagnies en un clin d’œil. Elle en renversa les Vong, les éparpillant comme des jouets sous la main d’un enfant en colère. L’onde de choc éventra les plus petits véhicules, qui ressemblaient à des dômes osseux blindés montés sur des cils épais comme des poils de brosse. Plusieurs roulèrent sur le dos, leurs pattes minuscules s’agitant dans l’air. D’autres s’arrêtèrent, leurs « cils » grillés par la décharge d’énergie.

Le véhicule que Dur Sept visait était plus impressionnant. Comme les autres, il avait un blindage rocheux. Sur son épine dorsale pointaient des excroissances. De boules de plasma en sortaient.

Jaina frissonna : le véhicule ressemblait à une limace blindée géante hérissée d’épines.

Elle vira à tribord et tira sur l’engin, qu’elle surnomma mentalement la « montagne ». Les trous noirs avalèrent ses rayons. La montagne riposta par des boules de plasma. Jaina évita la plupart, et entendit ses boucliers absorber les autres.

Elle remonta et mit les gaz à fond pour rejoindre la bataille, au-dessus du convoi. En prenant de l’altitude, elle vit d’autres torpilles à protons exploser, éliminant quantité de soldats et renversant les véhicules.

Sa stratégie donnait des résultats… Mais suffirait-elle ?

– Sparky, quelle distance entre les explosions au sol, au début et à la fin du convoi ?

Le droïd afficha la réponse sur le moniteur secondaire.

La colonne faisait au moins cinq kilomètres !

Si nous ne démolissons pas les montagnes, nous n’empêcherons jamais les Yuuzhan Vong d’atteindre le camp. Et quand ils y arriveront…

Leia sursauta lorsqu’une main se posa sur son épaule. Mara lui sourit.

– Tu m’as fait peur, grogna Leia.

– Désolée. Luke m’a dit de rester avec toi.

– Tu es sûre ? Tu ne devrais pas plutôt…

– Me reposer ? Je n’ai jamais aimé me sentir inutile. Alors, me voilà ! Que fais-tu ici ?

Leia désigna le périmètre nord-est.

– La plupart des réfugiés ont rallié le centre du camp, mais quelques familles de ce secteur s’en sont abstenues. Je suis venue vérifier si tout allait bien… et puis, j’ai senti quelque chose…

– Un problème ?

– Tu as perçu… du vide, n’est-ce pas ?

Elle montra une des tentes. On voyait des mouvements à l’intérieur. Mais quand Leia la sonda avec la Force, elle ne capta aucun signe de vie.

– C’est impossible !

– Hélas, non !

Elle se précipita sur la tente et coupa les cordes. La toile s’effondra sur ses occupants.

Les trois Yuuzhan Vong qui rampèrent à l’air libre, étaient couverts d’une pseudo-chair pâle et ils avaient mis des vêtements.

A leurs pieds gisaient trois corps nus ensanglantés.

Leia comprit. Des Yuuzhan Vong s’étaient infiltrés dans le camp, avaient tué des réfugiés, et se servaient de leurs camouflages oogliths pour prendre un aspect humain.

Si d’autres se sont mélangés aux véritables réfugiés, des innocents risquent de périr.